Visible entre fagne Mathy et bois de Pleinfays, agrippée à une butte, une cépée de hêtres marque la lisière séparant deux territoires cédés en 898 par le roi de Lotharingie au Prince-Evêque de Liège. D’une part, le sommet du versant, occupé par les fagnes aujourd’hui, et portant, jadis, le nom de Foresta constitue le domaine de chasse réservé au Prince-Evêque. D’autre part, en contrebas, des parties boisées, appelées Silva, qui sont décrites comme des lieux « stériles, montagneux, froids, emplis de neige à la mauvaise saison et ne produisant aucun fruit que bois et rochers ». Ils seraient totalement inhabitables s’il n’y avait eu la possibilité des services rendus par la présence des bois à disposition des manants qui y eurent accès pour pratiquer les droits d’usage : à charge de payer au Prince-Evêque un « stier d’avoine et quelques deniers » par ménage, les paysans ont utilisé la forêt pour y bâtir, faucher, couper du bois de chauffage, faire pâturer les bêtes ou mettre en culture des parcelles.
« Dans les forêts du sud de Spa, le charbonnage était pratiqué pour servir l’industrie du fer située au bord des cours d’eau. Sur une aire appelée aire de faude, les charbonniers édifiaient une meule importante constituée de coupes de hêtres ou de chênes séchés et débités ; cette pyramide était recouverte de terre et de cendres. À partir d’une galerie remplie de feuilles mortes et de branchages, le charbonnier boutait le feu au fourneau ; la meule « cuisait » lentement, parfois pendant une semaine. À terme on obtenait le précieux charbon de bois qui était vendu aux maitres des forges. De cette vente, les Princes-Evêques tiraient un revenu important. »
N’hésitez pas découvrir quelques outils du charbonnier au Musée de la Forêt des Eaux.
L’exploitation intensive de la forêt aboutit rapidement à la dégradation des forêts primitives ; en 1519, Erard de la Marck va fixer les limites des forêts où il est interdit de charbonner. Un mandement d’Ernest de Bavière, en 1603, concrétise le périmètre de protection en érigeant des bornes en forme de croix appelées croix d’embannement : elles sont d’une hauteur de 2,5m, dépourvues de Christ, avec la tête de croix plus longue que les bras.
« En fagne de Malchamps, en mémoire de l’artiste qu’il fut, se dresse la croix Dieudonné Jacobs, peintre célèbre de fagnes. Observez-la, elle a été érigée sur le modèle des croix d’embannement. »